Au temps où Pierre François m’honorait de son amitié, il m’avait montré une esquisse pour un calendrier de domaine vinicole : il avait peint un garçonnet juché sur l’encolure d’un cheval de trait qui tirait une énorme charrette de bois aux roues cerclées de fer. Cette peinture ouvrit un puits dans ma mémoire, j’y ai puisé l’essentiel de ce récit.
Enfin, des amis voulant à toute force savoir ce qu’il était advenu d’Aristide, j’ai raconté la suite et livré les dernières clés dans Aristide (deuxième tome à venir en décembre 2014).
Les protagonistes de ce récit, je les ai connus, touchés, de si près tenus, perdus, un billard de dingues. Certains ont disparu, les autres sont en passe de se dissoudre. Il me fallait figer et amalgamer tout ce théâtre. Une histoire d’enfance qui ne serait pas destinée aux enfants.
Ce sont maintenant les machines qui vendangent, plus de coles, et les chevaux de trait ont disparu du paysage.
Tous les lieux, sans exception, les vignes, la plage, le domaine, l’étang de Bagnas, le canal du Midi avec ses chemins de halage, l’île, la bergerie et le pont des crânes sont à peu de chose près comme je les ai décrits et tout se tient dans un rayon de trois kilomètres autour de Marseillan. De la chapelle préromane, Saint-Pierre de Fabricolis, il ne reste rien, du moins en surface, et le sarcophage du Wisigoth a disparu.
Le vin est meilleur d’année en année, dans certains domaines il est même excellent, mais pour ce que ça nous rapporte…
La vie s’écoule, une récolte chasse l’autre et nous continuons à nous débattre, de moins en moins entre nous.
— Michel Torres