— Viens avec nous Malika. Mô et moi, on va voyager, on va aller en Grèce avec l’argent qu’on gagnera à la pêche, sur une île que je connais pas le nom.
— D’où tu tiens ça Aristide ?
— C’est toi que tu m’as raconté l’eau claire de là-bas et le livre avec les photos que tu lis. Et puis on n’a pas de femme, pourquoi on n’a pas de femme, nous ? C’est joli une femme ; elle serait bien avec nous.
— Attention ! Une femme, c’est pas pour nous.
— Et pourquoi ?
— C’est pas un chat errant que tu peux apprivoiser. Contente-toi de ton Lapin.
— T’es comme le vieux Manuel, tu rigoles jamais.
— Il a raison votre ami, je le trouve plus drôle que vous.
Elle avait relevé la tête et souriait, rayonnante tout à coup la Malika, dorée comme un pain au chocolat, de grands yeux hardis, noirs aux cils démesurés, sourire de perles et crinière bouclée de lionne. Je ne pus m’empêcher de lui rendre son sourire.
Malika, Aristide et Mô, embarqués sur le port, glissando sur l’eau et installation naturelle dans notre bout du monde, au cabanon des fous ; elle furetait partout, et nous, on la regardait, on la buvait des yeux, on la reconnaissait, elle était du bateau, du nôtre : l’arche des chtarbés, le Radeau de la Méduse.
Elle est partie de là, notre histoire.